Pauline Marois fait l'autopsie du dérapage de la réforme scolaire

Michèle Ouimet signe dans Le Soleil de ce matin le compte rendu d'une excellente entrevue avec Pauline Marois (source de la photo), ex première ministre du Québec et ministre de l'Éducation lors du début de la réforme scolaire en 1997. L'article n'est pas en ligne à la façon habituelle, mais on peut le retrouver ici. Il serait utile que les enregistrements de telles entrevues soient rendus disponibles aux chercheurs, car il est difficile d'avoir accès à ce type d'information.

L'analyste des politiques que je suis s'intéresse à la réalisation (ou à la non-réalisation) de cette réforme d'un point de vue politique, en isolant ses grandes étapes selon la typologie de Jones (1970): émergence, élaboration, adoption, mise en oeuvre et évaluation. Cette approche séquentielle est questionnée, mais il est possible de la raffiner, comme je l'ai fait dans quelques-uns de mes travaux. La théorie des référentiels associée à l'approche cognitive et normative d'analyse des politiques publiques peut s'avérer un complément aux approches pluralistes, entre autres la gouvernétique à la manière de Vincent Lemieux. Si un candidat ou une candidate au doctorat s'intéresse à la réforme de ce point de vue, qu'il ne cherche plus un directeur de recherche! :-)

La réforme repose sur des objectifs simples, selon madame Marois: élimination des cours inutiles; retour aux matières de base; ne plus apprendre en silo et faire des liens. Je ne vois pas là les ingrédients du socioconstrutivisme (que certains qualifient de "radical") qui a par la suite été promu. Pourquoi la réforme a dérapé? (1) Trop de ministres de l'Éducation se sont succédés sans s'engager sur la question (François Blais est le 28e ministre de l'Éducation depuis 1964); (2) les enseignants n'ont pas été suffisamment associés à la réforme; (3) l'implantation a été trop rapide et trop vaste; (4) on a perdu de vue ses principes pour se concentrer sur ses modalités. Ce qu'il faut faire maintenant, selon madame Marois: "(...) on ne fait pas table rase. Il faut recentrer la réforme sur les principes et les orientations du début".

L'article rappelle aussi quelques résultats de l'évaluation de la réforme par des chercheurs de l'Université Laval sous la direction de Simon Larose où les ratés de l'opération, sur le plan pédagogique, ont été mises en évidence.

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